Comme chaque mardi, après l’école, Pierre s’était rendu à pied chez le professeur Wieck pour sa leçon de piano. Il avait un drôle de nom, ce professeur, parce qu’il était originaire d’un pays où les gens, apparemment, ont des drôles de noms. L’Allemagne. Pierre ne pouvait d’ailleurs jamais se rappeler comment le prononcer. Ouique ? Vièque ?
C’est très désagréable quand les gens ne prononcent pas bien le nom que l’on porte. Pierre le savait. Aussi se contentait-il de l’appeler «professeur», pour ne pas le vexer. « Heureusement, “Pierre”, ça tout le monde sait le dire ! » s’enorgueillissait-il, comme s’il s’agissait là d’un exploit.
Ce mardi-là, Pierre avait beaucoup de mal à se concentrer, alors qu’il jouait son morceau pour ce qui lui semblait la millième fois.
— C’est pas mal du tout, Pierre. Mais tu ne sembles pas très concentré. Voilà déjà plusieurs mois que tu travailles cette pièce.
Ah ! oui, non seulement le professeur avait un drôle de nom, mais en plus il parlait le français avec un bien drôle d’accent.
Pierre tapotait le clavier du bout du doigt en faisant la moue et en donnant des petits coups de pieds sur l’instrument pour bien marquer son mécontentement.
— Je ne suis plus sûr du tout de vouloir continuer à prendre des leçons. Ça ne va pas assez vite à mon goût. Vous savez, avec le pialeino, ça allait beaucoup plus rapidement. En une journée, j’avais appris plein de choses. Mais là, avec vous, je ne sais pas…
Ce n’était pas la première fois que Pierre évoquait cette bête étrange qu’il appelait le pialeino. Un mélange de baleine et de piano, que, selon les dires du petit garçon, il avait trouvé échoué sur une plage et sauvé d’une mort certaine en échange de leçons de piano.
Comme chaque mardi, Pierre se rend chez son professeur pour sa leçon de piano. Ce jour-là, il a l’impression de jouer son morceau pour la millième fois. Quel ennui ! Mais en sortant de chez M. Wieck, il rencontre Clara. Il découvrira bientôt ses premières émotions musicales et amoureuses.
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